Le funambule est un article en équilibre instable sur une corde dans le vide. Dans cette « narration-déposition-confession » référencée, Akli Wissem SNP joue à qui perd-gagne. Entre démence imposée et folie lucide, cet adulte sans âge se représente en spectacle en brulant des journaux devant une mairie. Il entame ainsi un long itinéraire vertigineux, en perpétuel déséquilibre, n'ayant pour instruments que son amour délirant de la poésie et des mots croisés.
En douze tableau subdivisés en mémoires et visions participant à la plus-value de l'histoire, nous pénétrons dans le réel vécu du personnage et de son passé, soit l'énigme de ses origines comme de sa destinée. De ce roman architecturé domine la figure du double, alors qu'Akli reste en quête d'unité : hôpital-asile, métaphore d'une certaine Algérie/ « trou » de la privation de liberté d'un maquisard de « l'insoumission » père omniscient/mère souffre-douleur ayant donné vie à un « accident de la colonisation » école française/mosquée, lieux de savoir dangereux l'un l'autre désir des mots/amour des sens dans des pérégrinations autant effectives que supposées du personnage. En définitive, la Norme admise tactiquement par presque tous ne pardonne pas l'écart parce qu'elle n'aime pas le Beau, le Vrai, le Juste.
Dans un style apuré, presque sans ponctuation, ne portant pas préjudice à la lisibilité du texte, Youcef Merahi donne à lire de belles tirades en sentences, des formules et expressions du terroir pastichées ou détournées. Il dissémine des réminiscences littéraires du passé ( les poètes de la nuit : Baudelaire , Nerval , Rimbaud , Si Mohand ) avec des citations des auteur d'aujourd'hui (les poètes de la désespérance national : Jean Sénac , Djamel Amrani , Tahar Djaout , lui-même ) . Dialoguant aves ces derniers, le romancier n'oublie pas d'interroger ses lecteurs sur les enjeux et pouvoirs présupposés de l'écriture.
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