[...] Un vieillard était assis à l'ombre du pont.
Je descendis le saluer. Je lui demandai pourquoi on construisait des ponts sur des rivières mortes.
&mdash Des planificateurs arrogants et lointains ont quadrillé leurs cartes de traits rectilignes et puissants. à l'encre de Chine, indélébile, de façon à rendre leurs projets définitifs et l'option irréversible. Des engins étrangers sont venus éventrer nos collines afin de tracer la ligne droite requise. Mais le fleuve coulait ailleurs, serein et libre. Ils ont maintenu que son cours se trouvait à l'endroit exact de leurs calculs, et ont entrepris de le détourner pour confirmer leurs dires.
Rachid Mimouni, écrivain majeur de la littérature maghrébine contemporaine est né en 1945 à Boudouaou (Boumerdes) et est décédé en 1995 à Paris des suites d'une hépatite aiguë. Il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages dont Tombéza et L'Honneur de la tribu. Mimouni a décrit avec minutie la déchéance planifiée de tout un pays et dressé un constat apocalyptique de la société. C'est ce pur regard ouvert sur l'absurdité du monde et le mal être
qui a fait dire à Jacques Cellard (Le Monde) - à propos du Fleuve détourné - « qu'il évoquait irrésistiblement le Kafka du Procès ou de La Colonie pénitentiaire, et le Camus de L'Étranger. »
 
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