C'est une belle symphonie sur le temps que nous offre Fadéla M'Rabet dans ce nouveau livre. A sa façon, impressionniste, elle circule à travers les moments de sa vie et, d'une époque à l'autre, nous restitue aussi l'histoire de l'Algérie. Les deux histoires s'entrelacent, avec des pages pleines de tendresse et de poésie quand elle évoque «  la magie des jours heureux » de son enfance et des pages impitoyables, quand elle dénonce le gâchis des espérances trahies et des attentes toujours déçues. Comme auttefois, les Algériens attendent, mais cette attente n'a plus d'objet. Vide, sans contenu, elle n'a d'autre lin qu'elle-même. Indépendance bradée, socialisme enterré. démocratie interdite : tragique bilan. Et juste colère contre les maffias qui pillent le pays et condamnent les Algériens à survivre plus qu'à vivre, à fuir quitte à se noyer ou à retrouver, en exil, le mépris de l'ex- colonisateur.
Colère qui jaillit du plus profond de l'amour que Fadéla M'Rabet éprouve pour son pays :
« Personne, écrit-elle dans une très belle page, ne détruira jamais l'amour que j'ai pour l'Algérie. () L'Algérie, c'est Djedda. Je suis habitée par son maintien, sa voix, ses parfums. Elle est mon regard qui soutient celui des hommes sans ciller, (...) elle est la couleur de mes cheveux, le khôl de mes yeux. Sa respiration rythme mes narrations, l'éclat de mes matins, quel que soit l'endroit où je me trouve, quel que soit le temps, restera éternellement celui de mes aurores à ses côtes, quand elle faisait sa prière debout face à la mer ».
Une femme debout : Fadéla M'Rabet est sans doute, pour bien des jeunes Algériennes, ce que Djedda a été pour elle. Aujourd`hui, comme dans la nuit coloniale, une lumière brille toujours.
Fadéla M'Rabet est docteur en biologie. A la suite de la publication de La Femme algérienne (Maspero l%5) et Les Algériennes (Maspero, 1967), elle a été interdite d'enseignement, de médias et a du quitter l'Algérie. Parisienne, elle a été maître de conférence et praticien des hôpitaux à Broussais Hôtel-Dieu.
 
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