On connaissait peu de choses sur le projet d'invasion de l'Algérie, avec le soutien de la France, par Mohamed Ali, le vice-roi d'Egypte. Pour avoir été abandonné in extremis, ce plan intéressait très peu les tenants de l'histoire positiviste qui n'étudient que ce qui a pu aboutir.
Le gouvernement du prince de Polignac a pris prétexte de la crise franco-algériennes provoquée par le coup d'éventail asséné en avril 1827 par Hussein Dey au consul de France Deval pour faire examiner le projet d'utilisation d'un despote éclairé oriental afin d'étendre son influence sur la rive sud de la Méditerranée . Les tractations entre la France et l'Empire ottoman auxquelles avait donné lieu ce plan préfiguraient le multilatéralisme des diplomaties actuelles.
A l'occasion du centenaire de la prise d'Alger, le commandant Douin a rendu publics les rapports rédigés par les diplomates , comme Drovetti , ce grand admirateur de Mohamed Ali , ou Guilleminot , ambassadeur à Istanbul , impliqués dans l'étude du plan d'occupation de l'Algérie par l'armée égyptienne , avec l'aide de la France qui s'était risquée au débarquement de Sidi Ferruch à la suite du refus égyptien d'une opération combinée impliquant une nation chrétienne .
La lecture de ces archives permet une meilleure connaissance de la Question d' Orient à une période où l'affaiblissement de l'Empire ottoman était aggravé par l'encouragement de l'Europe à la création des Etats régionaux plus ou moins indépendants.
Elle permet d'en savoir plus sur l'histoire de l'expansionnisme colonial qui avait suivi les leçons tirées des guerres menées par Napoléon en Europe. Ces enseignements faisaient découvrir les possibilités de réussite des politiques de domination indirecte de peuples non-européens par quelque roitelet musulman acceptant de servir les desseins d'une puissance européenne. L'état de vulnérabilité de ces pays qye Malek Bennabi nommera colonisabilité était tel que le colonialisme a pu passer, plus au moins facilement, aux conquêtes militaires.
Le lecteur découvre aussi que le grand dessein oriental envisagé par Bonaparte lors de l'expédition de 1798 et repris par la Restauration après 1815 , pour faire pièce aux menées britanniques , préfigurait la politique arabe gaullienne envisagée quand la politique de puissance des Etats-Unis a pu supplanter celle de l'Angleterre dans la région.
Il se rappelle enfin de l'ancienneté de l'utilisation d'une bonne guerre juste pour faire oublier une mauvaise crise intérieure.
Nul doute que la réédition de ces archives diplomatiques, prés de 80 ans après leur première publication, qui aura été vite oublié contribuera à une meilleure connaissance de la première période de l'histoire coloniale .
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